(Crédits : REUTERS/Benoit Tessier.)

Dans ses négociations avec la direction sur les conditions d’une compagnie à prix réduits et sur des mesures censées améliorer la performance d’Air France, le bureau du SNPL d’Air France demande une hausse de rémunération pour les pilotes après un gel des salaires depuis 4 ans. Ce jeudi, le syndicat des pilotes a par ailleurs demandé un débat avec les candidats à la présidentielle pour la relance du transport aérien français.

Si la direction d’Air France et le SNPL Air France ont trouvé un accord sur Transavia, on est encore très loin de trouver un terrain d’entente sur les conditions de création d’une nouvelle compagnie à coûts réduits par rapport à Air France (projet Boost) et les mesures sur les conditions de travail permettant d’améliorer un peu la performance d’Air France. D’autant qu’un nouvel élément est intervenu dans la négociation.

Surcoût de 130 millions d’euros

Selon des sources concordantes, le bureau du SNPL Air France a demandé une hausse de rémunération des pilotes de 13% d’ici à 2020, une mesure qui augmenterait les coûts pilotes de 130 millions d’euros par an. Selon un pilote, la requête est justifiée par la hausse des salaires de 2,1% accordée au personnel au sol, celle du comité exécutif de 17% en 2016, qui a suscité une vive émotion chez les salariés, et par la récente hausse des salaires des pilotes de Lufthansa de 8,7%.

Interrogé par La Tribune, Emmanuel Mistrali, porte-parole du bureau du SNPL Air France, a confirmé qu’une demande de hausse de rémunération avait été faite mais réfute d’évoquer des chiffres en milieu de négociations n’ont pas abouti.

« Il y a eu une baisse de rémunération des pilotes pendant la crise de 15%, pas de hausse de salaire depuis trois ans et cela devrait être la même chose en 2017 puisque les navigants sont exclus des négociations annuelles obligatoires. À un moment, cela suffit. Les pilotes sont prêts à s’investir mais ne sont plus prêts à donner et quand on investit, il y a un retour sur investissement. »

Cette requête interpelle alors que la négociation était censée porter sur des mesures d’économies de la part des pilotes autour de 1,5% par an. Cette demande suscite deux sortes de craintes chez certains salariés de la compagnie. D’abord qu’elle ne plombe les négociations, ce que le bureau du SNPL d’Air France ne verrait pas d’un mauvais œil dans la mesure où il avait appelé les pilotes à voter contre le projet Boost lors d’un référendum lancé en février (les pilotes avaient au contraire voté en faveur de cette filiale à prix réduits). Ensuite, qu’elle ne plombe l’équation économique du projet si la direction accédait aux demandes du SNPL.

Demande d’aide à l’Etat

Cette demande intervient alors que le SNPL (au même titre que d’autres syndicats et de la direction des toutes les compagnies françaises) demande de l’aide de l’Etat français pour améliorer la compétitivité du transport aérien tricolore. Pas plus tard que ce jeudi, le SNPL France (qui chapeaute l’ensemble des compagnies aériennes françaises) a invité les candidats à l’élection présidentielle, les parlementaires et les décideurs politiques à « engager un débat sur la relance du pavillon français ».

Le PDG demande une évolution des conditions de travail

On comprend peut-être mieux les propos de Jean-Marc Janaillac, le PDG d’Air France-KLM, mardi à lors d’un débat avec Marc Rochet, son homologue chez Air Caraïbes et French Blue, Erick Derivry, président du SNPL et Pascal Mathieu, administrateur salarié d’Air France. Après avoir déploré le poids de la taxation spécifique qui plombe le transport aérien français, il n’en a pas moins rappelé, à la fin du débat, la nécessité pour chaque compagnie de réaliser des gains de compétitivité internes.

« Si nous demandons une concurrence plus équitable et un environnement social et fiscal moins pénalisant, c’est parce que nous ne voulons pas que cela soit des justifications internes pour ne pas bouger et ne pas faire d’efforts. […]. Il faut, en même temps, que l’ensemble des personnels de la compagnie Air France accepte une évolution des conditions de travail, dans la façon de s’organiser, qui aille de pair avec les efforts qui ont déjà été faits dans le passé mais qui ne sont pas suffisants pour rendre le cadre français plus concurrentiel. Il faut que les deux avancent. »

Que va faire la direction ? Celle-ci est partagée entre sa volonté d’obtenir un accord coûte que coûte et celle d’arriver à un accord permettant, sans aller jusqu’à garantir la pérennité de l’entreprise, de donner un nouvel élan à une entreprise bloquée depuis trois ans.

Au-delà ce de cette question de rémunération, le SNPL et la direction croisent toujours le fer sur la validité juridique du projet Boost. Les deux parties vont faire appel à un professeur d’économie pour trancher.

« Je ne comprends pas. Quand bien même Boost serait attaqué en justice par les PNC (personnel navigant commercial, les seuls parmi le personnel à ne pas venir d’Air France mais à être recrutés sur le marché, NDLR), et que la décision de justice leur soit favorable dans un ou deux ans, nous mettrons des PNC Air France. Cela n’empêche pas le SNPL d’avancer », explique un dirigeant.

L’autre gros sujet mis sur la table par le SNPL consiste à rééquilibrer l’activité entre Air France et KLM, qui s’est creusé en termes de sièges kilomètres offerts en faveur de la compagnie hollandaise. Là aussi, les choses n’avancent pas.

Au final, il ne reste plus beaucoup de temps aux deux parties pour s’entendre. Selon certains experts, pour lancer une compagnie fin octobre comme le souhaite Air France, il faut trouver un accord fin mars.

 

Article de La Tribune