Des pilotes presque satisfaits, mais des hôtesses et stewards qui font grise mine. Au terme de trois journées de grève, du 18 au 20 mars, marquées par une forte mobilisation des personnels navigants commerciaux (PNC), la situation semble au point mort entre les syndicats UNSA et SNPNC, et la direction d’Air France. « Nous n’avons pas obtenu de relance des négociations. Il n’y a pas de calendrier » de reprise des discussions, déplore Christophe Pillet, porte-parole du SNPNC. Pourtant, la grève a été « extrêmement suivie », dit-il, faisant état d’un taux de participation au mouvement de « près de 60 % ». La direction de la compagnie conteste ces chiffres évoquant un taux de grévistes oscillant entre 29 et 38% selon les jours. Les deux syndicats, majoritaires chez les PNC, refusent toujours de parapher l’accord proposé par la direction qui était ouvert à la signature jusqu’au 15 mars.

Les hôtesses et stewards réclament « une négociation globale qui ne porte pas seulement sur Boost ». Selon le SNPNC, ils ne croient pas, en effet, que le projet de compagnie à bas coûts sur les vols long et moyen-courriers « apportera les résultats spectaculaires que l’entreprise pourrait attendre », notamment avec l’embauche sur Boost de PNC, dont la productivité serait inférieure de 40% par rapport à la moyenne du marché. La rémunération représente environ la moitié de cet écart de productivité précise la direction. Selon le syndicat, l’économie ne dépasserait pas « 62 millions d’euros par an ». La crainte des PNC est que la nouvelle compagnie n’emploie que des « jeunes peu rémunérés, avec du turnover ». Un outil pour « casser le système d’Air France » et ses PNC aux carrières longues et aux salaires plus élevés. Les syndicats redoutent que Boost se transforme en « un laboratoire, un moyen de chantage permanent, un comparatif interne » entre les personnels d’Air France et ceux de la filiale.

 

LES SYNDICATS VEULENT PLUS QUE 500 EMBAUCHES

Ils invitent la direction à « revoir sa copie sur l’accord collectif » proposé au PNC, notamment le volet embauches. Les 500 recrutements qui s’ajouteraient au millier d’hôtesses et stewards embauchés uniquement pour Boost sont loin de les satisfaire. Ils estiment, pyramide des âges oblige, que « dans les quatre à cinq ans à venir 1 200 à 1 500 départs naturels » devraient intervenir chez Air France. Pour l’heure, les PNC n’ont pas décroché de nouveau rendez-vous avec la direction.

Pendant ce temps, les discussions entre Air France et ses pilotes ont franchi une étape décisive. La direction et le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) ont conclu, jeudi 23 mars, un accord sur la revalorisation des rémunérations des copilotes de Transavia, filiale à bas coûts de la compagnie aérienne. Ces derniers seront alignés sur ceux d’Air France. « Une bonne nouvelle pour les copilotes de Transavia », se félicite Véronique Damon, secrétaire générale du SNPL. De fait, certains pourraient voir leur rémunération augmenter de 36 %. Il en coûtera près de huit millions d’euros à Air France. En contrepartie, les pilotes ont accepté un partage de codes entre Air France et Transavia pour faciliter les correspondances des passagers entre les deux compagnies. Les clients d’Air France pourront utiliser leurs miles pour voyager sur Transavia.

 

DES PILOTES EN POSITION DE FORCE

Forts de ce nouveau succès, les pilotes, qui se savent en position de force, veulent pousser leur avantage. La pénurie de navigants déjà constatée en Asie et au Moyen-Orient gagne les Etats-Unis. Elle devrait bientôt se manifester en Europe. Pour preuve, indique Mme Damon : « la liste d’attente de pilotes pour Air France sera épuisée d’ici un an et demi ». Un nouveau round de négociations avec la direction a été fixé au mardi 4 avril. Ce sera l’occasion pour le SNPL de remettre sur la table sa principale revendication : le rééquilibrage de l’activité entre KLM et Air France. Selon le syndicat, l’opération pourrait être lissée sur « six à sept ans pour ne pas pénaliser le développement de KLM ». Pour faire bonne mesure, les pilotes réclament aussi des hausses de salaires, environ 8 %, au prétexte qu’ils auraient été oubliés lors des dernières négociations annuelles obligatoires. Une revendication qui fait tache d’huile en Europe. Les navigants de Lufthansa, eux, viennent d’obtenir 11,4 % d’augmentation.

 

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